Les origines des Yakuzas : de l'ère Eido à l'ère Meiji


En dépit de leur notoriété au Japon moderne, l'origine précise des yakuza encore aujourd’hui sujet à controverse.


La première hypothèse historique possible serait qu’ils sont les descendants des Kabuki-mono ou Hamamoto yakko, apparus dès le XVII. Il n’y a pas de lien immédiat avec le théâtre, mais le mot « Kabuki » signifie être extravagant, excentrique. D’où l’idée d’un personnage qui ne se plie pas à la règle et qui se manifeste. Le groupe des Kabuki-mono réunissaient l’ère Tokugawa environ 500 000 personnes, toutes serviteurs du Shogun en tant que hatamoto, et c'est pourquoi ils sont également connus comme hatamoto-yakko (les domestiques du shogun).


Mais la Paix des Tokugawa les laissa sans travail, et de nombreux membres se convertirent au banditisme, pillant villes et villages à travers l’archipel. Ils prirent l’habitude de terroriser les populations, de semer le trouble, voire de tuer des citoyens pour le plaisir, d’où leur nom de « Kabuki-mono » (les « fou »). On les appelleraient également aujourd’hui des rônins.

On pouvait distinguer les Kabuki-mono par leur mode d'habillement particulier, leurs coupes de cheveux, la longue épée qu’ils portaient et leur mauvais comportement général.


Il n’existe néanmoins, aucune preuve tangible que le groupe Hatamoto-Yakko soit bien l’ancêtre des yakuza. Les yakuza eux mêmes défendent une autre hypothèse: ils affirment descendre des Machi-Yokko (« les serviteurs des villes »). Dans le courant du XVe siècle, les ancêtres des yakuza se seraient ainsi rassemblés pour créer des associations de défense pour se protéger des "Kabuki-mono" et de leurs divers méfaits. Ils vont ainsi devenir des Machi-yako, que l’on pourrait présenter comme étant des défenseurs des opprimés. Ce groupe va peu à peu se diviser en deux castes distinctes :


- les Bakuto (joueurs professionnels) qui travaillaient dans les villes, et contrôlaient le monde des jeux de hasard, très en vogue à l’époque (c’est encore aujourd’hui une des activités les plus lucratives des yakuza.

- les Tekiya (porteurs et camelots) qui travaillaient sur les routes.


À l'origine, le recrutement des membres de ces deux groupes se faisait dans les mêmes milieux (paysans sans terres, voyous). Chaque groupe une fois constitué, s'attachait un territoire fixe et restreint. Comme la mafia italienne, les yakuza sont organisées en familles selon une hiérarchie très stricte. Toutefois, cette hiérarchie est accentuée par le système de oyabun-kobun (litt. père-enfant), l'Oyabun fournissant conseils, protection et secours contre loyauté et services du Kobun.


Dès 1603, certains rônins, samouraïs en rupture de ban mis au chômage par la Paix des Tokugawa qui durera 250 ans, rejoignent ces deux groupes. Néanmoins, bien que se proclamant défenseurs de la veuve et de l’orphelin, ils ne défendent la plupart du temps que leurs propres intérêts, et vivent de brigandages.


C’est véritablement au début du dix-huitième siècle que voient le jour, dans les grands centres urbains d'Osaka et d'Edo (ancien nom de la ville de Tokyo), les organisations yakuza sous la houlette de chefs de bande.


Les groupes yakuza sont également constitués de hinin (non-humains) et de eta (pleins de souillure) qui, dans la hiérarchie sociale, sont derrière les samouraïs, les artisans et les marchands. Les hinin regroupent les gens du spectacle, les gardiens de prison, les bourreaux, etc. ; quant aux eta, ils sont essentiellement constitués par ceux dont le métier est lié à l'abattage d'animaux. D'ailleurs, l'origine de leur discrimination se trouve sans doute dans la religion shintô et dans le bouddhisme qui considèrent comme une souillure toute occupation liée à la mort et au sang.


Bien que « libérés » en 1871 lors de la restauration de Meiji, ces burakumin (littéralement gens du hameau) ont toujours souffert de multiples discriminations de caste, principalement à l'emploi et au mariage. Cet état de fait perdure encore de nos jours et contribue encore à fournir les rangs des yakuza. Les burakumin représente 70% en effet des membres du Yamaguchi-gumi, le plus grand clan yakuza.

Aucun commentaire: